La différence entre elle et moi [Pv MinHwan Park]

Le cadran se mit à sonner très tôt, soit à six heures trente plus précisément, mais une main vint l’éteindre tout de suite en pesant sur le bouton. L’occupante de la pièce était déjà à côté de l’objet lorsque celui-ci fit vibrer l’air de sa mélodie… Car non, il ne retentit pas un son horrible dans la totalité de la chambre. L’unique enfant de la maisonnée sourit, même si elle n’était pas réellement si jeune que cela. Elle se retourna ensuite pour regarder ce qui lui servait de dortoir. Tous les murs étaient blancs à l’exception d’un seul de couleur parme. Tous les meubles, quant à eux, étaient d’un bois foncé. Globalement, la pièce avait des allures sobres et apaisantes… Mais rien qui rappelait une jeune fille dans la fleur de l’âge, vu le manque de couleurs le moindrement éclatantes. Enfin, la pièce était propre et c’était ce qui comptait présentement aux yeux de la japonaise. Et oui, cette dernière était levée depuis longtemps, déjà. Elle était une lève-tôt et se réveillait donc presque toujours plus tôt que son réveille-matin… dont elle gardait l’alarme activée uniquement pour se sortir de ses rêveries éveillée si besoin était. Bref, satisfaite de son ménage matinal, elle quitta la pièce qui lui servait si souvent de refuge.

Elle constata pendant son petit déjeuner que la température était un tant soit peu maussade. Le paysage urbain qui s’offrait à elle n’était que des teintes de gris. L’ambiance était quant à elle dictée par le bruit que causait la pluie. L’universitaire observait sereinement les gouttelettes glisser le long des vitrines, dégustant simultanément son repas qu’elle avait elle-même préparé. Ce n’était rien de bien spécial… Elle ne s’était concocté qu’un bol de riz, un œuf et un peu de poisson grillé. Une fois le repas terminé, elle déposa ses mains une par-dessus l’autre sur la table. Que pouvait-elle faire en ce jour de pluie? Bien des choses, mais elle était humaine comme tout le monde… En d’autres termes, elle pensa à une de ces occupations universelles, soit à une de ces activités que l’on pratique peu importe notre origine ou notre culture. Son choix s’arrêta alors sur le shopping. Un centre commercial était toujours un excellent moyen pour faire passer rapidement une journée. La demoiselle Yada caressa de son index sa lèvre inférieure en approfondissant sa réflexion. Elle retourna tranquillement à sa chambre, laissant ses pieds caresser silencieusement le plancher à chacun de ses pas. Elle prit subséquemment son portable qui reposait sur sa table de chevet. Qui devait-elle inviter à aller faire les boutiques avec elle?

Pour chaque contact qu’elle voyait défiler dans sa liste, la jeune femme trouvait une raison l’empêchant de composer le numéro qui s’affichait à côté de chaque nom. Elle s’était dit, entre autres, que sa Smile Maker Miho devait être occupée à faire des devoirs… Puis que Keiji était un garçon, donc il ne devait pas vraiment apprécier ce genre d’activité. De toute façon, la nippone se voyait mal lui lancer une invitation quelconque, surtout lorsque celle-ci était faite à la dernière minute. En somme, elle se dit pour raison qu’elle devait se rendre seule au centre commercial de Tokyo (du moins, l’un des…). Parallèlement, on reconnaissait bien Sayako Yada dans cette manière d’agir et de penser. Elle ne se valorisait pas assez et s’imaginait toujours qu’on tenait moins à elle que ce n’était réellement le cas. De plus, elle était craintive et avait sans cesse peur de déranger. Même sa façon de se préparer à sortir illustrait bien quel genre de personne elle était. À savoir qu’elle n’expérimentait pas avec ses coiffures, choisissant plutôt ce qui était modeste. Son maquillage était toujours discret, si elle en avait, mais ce n’était jamais extravagant. Tout compte fait, elle était soucieuse, mais appréhensive.

Rien ne pouvait enlever la gentillesse innée de l’universitaire. Ce n’était pas sa fortune, son nom, ni le climat froid qui régnait au sein de sa famille qui ferait en sorte qu’elle regarderait ses serviteurs de haut. Pour elle, ils étaient des êtres humains au même titre que sa personne et leur emploi consistait uniquement à la servir puisque ses parents les employaient. Ce pourquoi elle utilisa la plus haute forme de politesse afin de remercier son chauffeur qui l’avait amenée là où elle voulait aller. Sans compter qu’il devait désormais l’attendre dans le stationnement et ce, dans le but de ne pas être trop loin lorsqu’elle le contacterait pour lui indiquer qu’elle avait terminé. Par la suite, elle se dépêcha à traverser les immenses portes du centre commercial. Comme à chaque fois qu’elle y venait, elle admira les lieux avec la bouche entrouverte. Elle joint gaiement ses mains ensemble pendant qu’elle décidait de la direction à prendre pour entamer son parcours de la journée. Elle fit des pauses ici et là, regardant des mannequins derrière les vitrines avec des étoiles dans les yeux… mais elle n’entra jamais pour essayer ses coups de cœur. Elle ne pourrait jamais s’en tirer avec de tels vêtements… Elle n’avait pas la figure pour et certains morceaux qu’elle avait vu auraient trop contrasté avec son visage encore enfantin malgré que la vingtaine approchait à grand pas.

Après deux heures de shopping en solitaire, la japonaise se retrouvait avec peu de choses entre les mains… Voire que ses achats consistaient uniquement de produits de soins pour le corps ou d’items rafraîchissant qu’on retrouvait dans les boutiques de produits organiques pour la plupart fruité. Ce n’était pas pour autant qu’elle n’avait pas dépensé un yen… Car elle avait tout de même un parfum Dior, de la crème hydratante de jour et de nuit par Vichy, de la crème pour les mains, ainsi que des roseaux diffuseurs à flagrance de pomelo vanille. Elle n’avait toutefois pas de vêtements… ce dont elle aurait pu bénéficier puisque tout ce qu’elle possédait datait d’avant son passage dans un centre spécialisé… Toutefois, elle n’était affectée ni déçue de s’être involontairement privée à cause de préjugés qu’elle se portait… jusqu’à ce qu’elle tourne la tête en passant devant un panneau publicitaire alors qu’elle se rendait plutôt en direction des restaurants. Elle s’arrêta machinalement et fit face à la photo de la perfection incarnée de grandeur nature et fut sidérée sur place. Elle débuta à se comparer visiblement sans s’en rendre compte. Elle jetait un regard en direction de cette femme qui avait les courbes d’une déesse et baissait ensuite le regard en direction de son corps à elle, qui était plutôt plat. Elle se touchait le contour du visage pendant qu’elle faisait grand cas de celui du mannequin sur l’annonce. Après un moment, elle tenta de s’éloigner de cette influence nocive sans détourner le regard… Or, elle passa à quelques centimètres près de marcher directement dans une personne qui se tenait près d’elle. Elle s’inclina poliment et entreprit de s’excuser.